2017 – LEÇON DE PEINTURE
Exposition du 8 mars au 12 avril 2017
Entre 1975 et 2008, date de sa mort, quelques trente années de travail ont permis à Stéphane Hazera de construire une œuvre unique dans l’histoire de la peinture. L’artiste et professeur d’arts plastiques s’est maintenu dans une réflexion sur la représentation en s’appuyant sur des images relatives à la production picturale (atelier, natures mortes, drapés, nus, fenêtres, paysage) et des images extérieures à cette fabrication (objets usuels, illustrations élémentaires du dictionnaire) parvenant ainsi à un répertoire de signes reconnaissables dans la dernière série Histoire de la peinture.
L’histoire des formes constitue en effet le corpus de cette entreprise de synthèse artistique dont la seule ambition pédagogique est celle de la répétition lancinante et scolaire de ces motifs : le pot de fleurs que le maître pose sur son bureau, une plante, les pommes de Cézanne ou la poire de Balthus, les reproductions de nus historiques (Michel-Ange, Ingres, Vélasquez…) que l’artiste épingle aux murs de son atelier, en somme toutes compositions mises en évidence pour l’apprentissage du parfait pictural.
La cohabitation avec ce qu’il a désigné comme des objets autonomes (neuf en tout : oiseau, feuille…), fait basculer ces motifs du côté des icônes et le tableau vers la quête de l’image essentielle. Pour Stéphane Hazera, le peinture est une coulée qui vient des origines, sur laquelle il a planté des tableaux et des objets comme pour parvenir à un langage universel, une écriture éternelle. Analyse abréactive de la représentation occidentale, la Peinture devient alors un nom générique et l’Atelier le programme de cette œuvre. Dans cette dernière série, le travail construit sa propre topologie comme des territoires interchangeables, engageant temps et espace, passé et présent. Telles des gammes, les signes et les motifs ne cessent de faire et de défaire toiles et plans, cadres et fenêtres déroulant ainsi les multiples variations d’un même geste et les conditions d’une peinture infinie.
La constitution d’un alphabet et d’une généalogie prouve qu’il s’est livré éperdument à l’organisation méthodique et illimitée d’une mythologie picturale dont l’enjeu est une synthèse du geste matériel de peindre que l’artiste a théorisé dans Du Verbe Peindre1. Dominé par l’obsession de trouver l’image et le mot justes, le peintre et théoricien a mené de front une recherche à la fois plastique et théorique sur l’abréviation de la représentation picturale, dont la réduction en marque somptueusement l’étendue.
Nous sommes donc en présence d’une utopie anhistorique, une matrice dont le goût pour la synthèse et la tautologie mènent à la même image : soit l’équivalent d’un archétype ou d’une leçon dont l’exemplarité et la précision fascinent.
Corinne Szabo