M2M – 26 mars

Faire croire, selon Michel Montaigne

Evelien Chayes
Institut de Recherche et d’Histoire des Textes
Mardi 26 mars à 17h00
Salle Morin

Dans cette conférence, Evelien Chayes vous propose de parler de « croire et faire croire » dans les Essais de Montaigne. La postérité l’a tantôt fait passer pour grand précurseur du libertinisme du XVIIe siècle ; référent à sa critique sceptique, on se demande de temps à autre s’il était bon catholique, catholique modéré, secrètement protestant ou peut-être encore fidèle à son ascendance juive-ibérique. Mais au lieu de classer le philosophe dans l’un ou l’autre camp religieux, il s’agirait de lui tendre l’oreille et de s’intéresser aux distinctions qu’il fait entre croire, faire croire, la croyance, le jugement privé et l’opinion publique. Au bout de cette lecture et réflexion, un lecteur pourrait s’imaginer les conversations que l’auteur aurait éventuellement eues avec ses concitoyens.

Docteure de l’Université d’Amsterdam aux Pays-Bas, avec des études suivies à la Sorbonne Nouvelle Paris III, Evelien Chayes travaille à l’Institut de recherche et d’histoire des textes du CNRS à Paris. Seiziémiste dont les travaux récents mettent l’accent sur l’histoire intellectuelle et culturelle, elle a travaillé sur la poésie dite « scientifique » de la Renaissance, sur la littérature des savoirs et sur l’écrivain-philosophe et ancien maire de Bordeaux Michel de Montaigne (1533-1592).

Comme elle passait d’interminables journées dans les dépôts d’archives, elle a collaboré dans le projet Montaigne à l’œuvre (dirigé par le Centre d’Études scientifiques de la Renaissance à Tours) pour reconstituer le milieu intellectuel du grand écrivain dans la ville de Bordeaux même, à la base des archives du parlement de Bordeaux, des bibliothèques privées de l’époque et des pratiques de l’écriture au sein du parlement.

En 2022, elle a fait la découverte d’un ensemble d’actes notariés concernant Michel de Montaigne accompagné d’un texte autographe du philosophe, exhumés pour la première fois depuis 1584, il y a 440 ans. Archivés dans un paquet fermé par une couture en fil de l’époque, un ensemble lui-même relié dans une liasse, ces actes faisaient partie des archives du notaire sollicité par le philosophe, avant d’être versés aux Archives départementales de la Gironde. Cette découverte permet aux chercheurs de situer Montaigne dans son rapport avec ses contemporains, non seulement les grands acteurs politiques, princes et seigneurs, mais aussi les figures totalement inconnues, artisans, notaires, clercs et témoins émergeant dans ces actes : ils constituent le réseau des micro-histoires de la ville de Bordeaux que l’historien peut reconstituer à la base de sources dispersées mais liées entre elles dans une constellation invisible et complexe.

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